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"Tu es Cela - Plus proche que proche - Déjà là"

Méditation sans objet

 

  couverture mediter

 

"Nous consacrerons cette séance à une méditation assise qui porte plusieurs noms. Nous l'appellerons la méditation sans objet. Elle contient toutes les autres pratiques : le paysage du souffle, le paysage corporel, aérien, mental, le paysage intérieur, extérieur, l'univers tout entier, tout le domaine de l'expérience humaine, intérieurement et extérieurement.

 

A travers notre pratique de la pleine conscience, nous cultivons une attention capable de gagner en intensité et en stabilité, surtout lorsqu'on pratique assidûment avec l'effort et l'intentionnalité juste. Cette conscience peut-être étroite ou large selon les circonstances, elle peut reconnaître et accueillir toute sensation au sein du corps y compris les sensations du souffle.

 

Elle peut reconnaître ce qui est vu, ce qui est entendu, ce qui est senti, ce qui est goûté, ce qui est touché. Ainsi que les activités mentales que nous appelons les pensées et les émotions, Et elle peut demeurer dans une connaissance non conceptuelle, directe de chacun ou de tous les aspects de l'expérience humaine au-delà de la pensée, sans séparation ni identification.

Aussi l'ultime extension, si l'on veut, à l'intérieur de ce cadre, consiste à abandonner le cadre au sens où nous ne choisissons pas de focaliser la conscience sur un centre d'attention mais de laisser le champ de la conscience illimitée puisque la conscience, est véritablement, et a toujours été illimitée.

 

En revanche, chez les esprits non exercés à la pleine conscience, la conscience a tendance à se contracter et à former un noyau autour d'apparitions particulières dotées pour nous d'une charge émotionnelle puis elle tend à se figer et à devenir très étroite ou très égoïste et égocentrique.

 

A moins qu'elle ne tombe en désuétude totale, en d'autres termes, qu'il n'y ait pas de conscience du tout mais seulement l'obsession ou l'insipidité; Aussi, à cet instant, demeurez simplement dans la conscience.

Pour commencer, laissez peut-être le champ de la conscience accueillir le paysage sonore qui est comme nous avons pu l'expérimenter, encore et encore, toujours ici, se présentant à nos oreilles, englobant tout ce qui se présente, sous la forme de sons et d'intervalles entre les sons. Tout sans exception. Demeurez donc dans ce paysage sonore, devenez-le, sans forcément établir une distance entre vous et ce qui est entendu.

 

Entendez simplement, maintenant., à cet instant même.

 

[Silence]

 

Bien entendu si des pensées parviennent à s'infiltrer permettez leur d'être connues, car la conscience peut inclure la connaissance de la pensée.

 

[Silence]

 

Puis étendez le champ de la conscience quand vous en avez envie pour inclure l'air qui caresse la peau, l'air qui est le souffle, l'air qui porte les sons et demeurez dans la connaissance de l'air et du souffle. A travers les sensations dans le corps, puisqu'une fois de plus ce n'est qu'à travers les sens, y compris le mental, que nous pouvons connaître toute chose.

 

[Silence]

 

Nous pouvons naturellement laissez  le champ de la conscience inclure les sensations associées à la respiration ou au contact de l'air sur la peau mais également toute sensation, toutes les sensations présentes dans le corps, ici-même tandis que nous sommes assis.

 

[Silence]

 

A cet instant, le champ de la conscience est tellement étendu que nous percevons des sons et les intervalles entre les sons, nous percevons le souffle et l'air,  et nous percevons des sensations dans le corps. C'est beaucoup et tout se passe en cet unique instant et rien n'est séparé bien que l'on puisse en isoler n'importe quel aspect. laissez donc tout simplement tout être présent, sans séparation à ce instant et demeurez dans la conscience des sensations, de toutes ces sensations. Etre assis, respirer, ressentir, entendre, connaître.

 

[Silence]

 

Et pourquoi exclure la pensée, puisque de toute façon elle poursuit également son cours. laissons le champ de la conscience s'étendre davantage pour inclure la pensée, le flux des pensées, les bulles de pensées, et tout courant, remous, ou tourbillon émotionnel susceptible d'apparaître dans le mental ou dans le coeur accompagnés ou non d'images et de pensées, de souvenirs ou de fantasmes et demeurons simplement dans cette conscience, cette vaste corbeille qui contient tout.

 

[Silence]

 

Puis, dans une dernière expansion, laissons le champ de la conscience s'étendre infiniment pour permettre au coeur de l'esprit d'être illimité, immensément spacieux, aussi vaste que le ciel ou l'espace même, sans commencement, sans fin, sans frontière, sans circonférence, sans périphérie, sans centre.

 

Et plutôt que d'être centré sur un objet en particulier notre conscience n'en choisit tout simplement aucun. Demeurez dans la dimension connnaissante, non conceptuelle de l'esprit même, sans rien rechercher, sans rien convoiter, sans rien rejeter et sans rien visualiser.

 

Mais comme une sorte de champ électromagnétique qui percevrait instantanément la moindre perturbation, le moindre mouvement qui surviendrait en son sein, le champ de la conscience connaît, détecte, ressent, voit et sent tout ce qui bouge tout ce qui survient, tout ce qui s 'attarde, tout ce qui se dissipe. Tel un miroir avec beaucoup plus de dimensions. Demeurez donc dans la conscience même, dans la dimension sans objet, illimité, vaste, spacieuse de la conscience même. Si le son prédomine à certains moments, le son est connu. Si la pensée suit le son, la pensée est connue, comme pensée, non conceptuelle, elle est reconnue, connue, sentie, ni repoussée, ni convoitée, ni condamnée, ni exaltée.

 

Et si l'instant d'après, une sensation apparaît dans le bas de votre dos, ou dans votre genou et qu'elle prédomine dans le champ de la conscience pendant un moment. Elle est également sentie, vue, connue, ni repoussée, ni convoitée, ni condamnée, ni exaltée. la conscience fonctionnant comme un miroir vide, ouvert et spacieux.

 

Vide et plein, capable de contenir n'importe quoi et n'ayant besoin de rien pour être complète, sereine, imperturbable, jamais absente, comme le soleil qui brille toujours, y compris quand il est obscurcit par les nuages et même quand nous sommes irrités ou contrariés.

Ce champ de conscience accueille pleinement l'irritation et la contrariété, la peine et la joie, tout et n'importe quoi, douleur, inconfort, agitation, ennui, dépression, tristesse. Il n'est pas d'état d'âme ou d'état corporel qui ne puisse être pleinement accueilli, vu, senti, connu dans cette vastitude infinie et illimitée. Cette dimension connaissante de l'esprit du coeur.

Demeurez en elle, demeurez dans sa luminosité et dans son éclat naturel.

 

Sans nulle part où aller, sans rien faire, sans rien à atteindre, sans choix à faire et sans personne pour les faire. c'est ce que la tradition zen chinoise, la tradition chan appelle parfois illumination silencieuse ou la méthode de la non méthode. Dans le zen japonais on parle parfois de shikantaza. Shikantaza qui littéralement signifie juste assis, rien de plus. Rejeter toute pensée de méditation et soyez juste assis; Dans la tradition tibétaine, elle est souvent nommée dzogchen ou essence de l'esprit, grande perfection naturelle. Rien ne manque, rien est en trop; demeurez dans cette conscience sans choix que les tibétains nomment parfois non méditation.

 

Quand tous les échafaudages se dissipent ils ne parlent plus de méditation mais de non méditation. Quelques adjectifs permettent cependant de la préciser davantage et de démontrer sa complexité. Non distraite, non fabriquée, non méditation. Juste ce moment pris en compté, étreint, vu et connu tel qu'il est par cette vastitude infinie, cette connaissance qui inclut tout et qui nous distingue véritablement en tant qu'être humain.

 

Aussi, le mieux possible, avec un effort sans effort, demeurez dans la conscience sans choix. Si des pensées apparaissent elles sont prises en compte dans la conscience, vues et connues à leur apparition comme des bulles remontant du fond d'une marmite, elles éclatent simplement toutes seules.

 

Les tibétains parlent alors d'autolibération, les pensées s'autolibèrent, jolie image. Vous n'avez rien à faire. demeurez simplement dans la conscience. Juste attentif aux sons, aux sensations, aux impulsions, aux perceptions, aux pensées, aux émotions. Toutes, allant et venant dans cette vastitude bienveillante, douce, compatissante, acceptante,  et inclusive. Sans centre, sans périphérie, sans programme, sans préférence, sans observateur, juste l'observation. Sans personne assise, juste l'asseoir. sans connaisseur juste la connaissance. Aucun mot, juste ceci, juste ceci.

 

[Silence] 

 

Bien entendu si vous vous perdez dans le juste ceci, ce qui peut arriver, très, très facilement, visualisez peut-être un objet quelconque en laissant le champ de la conscience se réduire, rétablissez la stabilité du mental, puis laisser le s'étendre de nouveau, à votre convenance, progressivement,  comme nous venons de le faire ou en vous propulsant directement dans la conscience sans choix car la conscience n'est jamais absente.

Elle est toujours disponible, la plus minuscule orientation  orthogonale nous propulse au-delà du temps, de l'espace, des goûts et des dégoûts, de la méditation et de la non méditation. Juste éveillé. Un vaste champ de conscience chaleureuse.

Demeurez ici, rien ne se passe, rien de particulier. Simplement la vie qui s'exprime et la connaissance.

 

[Silence] 

 

Et dans les derniers instants de cette méditation, si vous en vez envie, revenez au souffle, laissez aller un instant la vastitude, et visualisez de nouveau le souffle, ou le souffle dans le corps, ou le corps tout entier qui respire assis, ici. Ou tout ce que vous avez envie de visualiser, et si vous avez simplement envie de continuer de demeurer dans la conscience sans choix, alors, bien entendu, conformément à l'esprit de cette pratique, c'est votre choix, sans choix.

 

Demeurez ici jusqu'à ce que le tintement des clochettes signale la fin de cette séance de pratique formelle. Et gardez à l'esprit que cette vastitude, ouverte, et immaculée du coeur et de l'esprit vous est accessible à tout moment de votre vie qui se déploie. Une vastitude jamais séparée de vous, ni inhabitable, si vous cultivez une conscience ininterrompue dans votre vie quotidienne quand vous vous engagez, si vous en avez envie,si cela a un sens pour vous, dans la discipline régulière de la pratique formelle de la pleine conscience, avec ces cd ou seul. Un engagement qui équivaut à vous livrer encore et encore à l'aventure de toute une vie, à la culture de la présence, pour être libre de l'angoisse d'une souffrance inutile, d'émotions afflictives, de l'ignorance de ce qui est fondamental à la vie. Et pour accueillir pleinement, avec un amour bienveillant, avec compassion et sagesse, tous les êtres y compris vous-même qui vivent, respirent et parfois souffrent, en ce monde mystérieux et grandiose où nous nous trouvons."

 


Transcription de la piste 12 : "Méditation sans objet (30 minutes)" du cd joint au livre :

"Méditer : 108 leçons de pleine conscience"  
Auteur : Jon Kabat-Zinn - Traducteur : Olivier Colette - Narrateur : Bernard Giraudeau.
Paru le : 16/04/2010 Editeur : Les Arènes
Prix : 24,80 euros

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