Arnaud Desjardins : Approches de la méditation
(Editions de La Table Ronde - Paris, 1989)
Extraits et résumés
Première partie : Vue d'ensemble
Chapitre 2 : L'érosion des obstacles
[2.2. : pages 49 à 54]
Erosion by river (Page 49)
"[A. Desjardins] insiste sur la nécessité de tarir peu à peu la source [des] agitations [du mental]."
[Il revient sur "la position de témoin" qu'il a préconisée et détaillée dans les pages précédentes.]
(Page 50)
[...] La position de témoin permet de reconnaître qu'aujourd'hui pour le moment, apparaissent des pensées, et même des pensées chargées d'émotion, des souvenirs du passé, des projections sur le futur, qui ne cessent pas de monter de la profondeur à la surface, d'encombrer le champ de la conscience et de se succéder les unes aux autres. On ne tente certes pas de les nier, alors que dans les diverses formes de concentration, "one pointed mind", on court le risque de vouloir nier la puissance ingrate et décourageante de ce fond d'où émergent toutes les agitations. Mais pour que la mare devienne lisse et transparente, il faut éliminer la fermentation dans la vase et les bulles qui crèvent sans arrêt à la surface."
"L'expression "faire silence" [...] [: ] On ne peut pas faire silence. [...] On peut qu'arrêter les bruits. [...] Vous pouvez faire du bruit si vous le souhaitez, mais si vous souhaitez faire silence, vous pouvez seulement cesser de faire du bruit. Et il y a en nous une source de bruits.
[...] [Faire le vide :] [On ne peut] pas faire le vide. Le vide [...] se révèle quand ce qui encombre a été supprimé.
(Page 51)
"[On ne peut être immobile. On peut] seulement cesser de faire des gestes, cesser de bouger.
Si l'état de méditation n'est autre que le silence du psychisme, si le but de la méditation est de s'établir dans ce silence, qu'est-ce que nous pouvons faire ? la réponse apparaît nettement : Rien. Nous pouvons seulement ne pas faire.
Méditer est considéré comme une pratique. Mais nous nous rendons compte que la méditation est au contraire une non-pratique, par l'effacement des divers mouvements de la pensée, des divers bruits qui sont en nous et de tout ce qui encombre notre conscience.
[...] Attention à la voie sans issue qui consisterait à vouloir à tout prix faire silence, même avec persévérance, même avec zèle et courage sans tenir compte de ces agitations qui stagnent en vous à l'état latent.
Les méditations que je vous propose sont des exercices préparatoires pour gagner un minimum de contrôle sur la pensée, de maîtrise de l'attention. Mais à partir de là, pas d'illusions, tant que ces obstacles à la méditation, ces dynamismes de retour dans le monde de l'attraction et de la répulsion ont leur source en vous et que cette source n'est pas neutralisée, il faut que vous en teniez compte."
[...]
(Page 52)
[...]
"Chitta shuddhi" : Purification de cette forme du psychisme considérée avant tout sous l'aspect de la mémoire, y compris la mémoire inconsciente d'où naissent tous les remous de surface, tout ce qui représente l'ennemi (pour ne pas dire le cauchemar) des méditateurs, y compris les envies de bouger, les pulsions motrices."
[...]
(Page 53)
[...] Et si nous essayons de faire silence alors que, dans la profondeur de nous-même, non seulement "ça" parle mais "ça" crie, quel résultat allons-nous atteindre ? Il est vain de s'exercer même patiemment [...] à faire silence sans rien tenter pour tarir la source des bruits.
[...] Et c'est là que l'expression "chitta shuddhi", épuration de chitta, prend tout son sens.
Chitta [...] comprend les samskaras : les impressions qui se sont déposées en vous, qui vous ont marquées et qui demeurent vivantes avec leur dynamisme, et les vasanas, proprensions, pulsions, envies, demandes, désirs.
Ces dynamismes vivants dans la profondeur du psychisme sont nés de la manière dont vous avez vécu le passé, la manière dont vous avez été ou non aimé. Nous voudrions retrouver ce qui a été heureux et ne jamais revivre ce qui nous a meurtris. Mais la complexité de ces mécanismes va jusqu'à la tendance à reproduire des situations anciennes même si elles ont été douloureuses, comme si nous étions fascinés malgré nous par des souffrances que nous avons déjà connues.
[...]
(Page 54)
[...] Comment faire pour qu'un jour ce vide, qui est en même temps plénitude, cette absence de forme de votre conscience d'être, soit à votre libre disposition ?
Comment procéder pour que vous puissiez librement vous situer en deçà des perceptions et conceptions dualistes, de tout ce qui rend votre vie frustrante, limitée, relative et vous empêche d'accéder à l'Absolu ?
Comment arrêter les bruits, les agitations aussi simplement que nous débranchons un ventilateur, appuyons sur un interrupteur électrique, ou cessons de bouger après avoir remué le bras ?
Pourquoi l'arrêt des mouvements n'est-il pas possible au niveau psychique ?
A cause des "latences" dans les profondeurs du psychisme.
Résumé et extraits d'Approches de la méditation d' Arnaud Desjardins .- Editions de La Table Ronde, Paris, 1989.
Table des matières